Invité à animer une conférence-débat, récemment, à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké dans le centre de la Côte d’Ivoire, le Pr. Néné-bi Séraphin a fustigé la politique foncière en Côte d’Ivoire. Cela, tout en faisant des propositions pour en finir avec les conflits fonciers.
Cette conférence-débat qui s’inscrit dans le cadre d’une tournée dans les Universités publiques pour expliquer le foncier rural et urbain, a eu pour thème, « Du domaine rural au domaine urbain, quelles implications sur le mode de gouvernance foncière ? ».
Selon le conférencier, pour marquer la volonté de sécuriser le foncier, en s’inspirant du modèle austral, c’est à partir de 1900 que le gouvernement va chercher à faire entrer dans le monde rural la question de l’immatriculation des terres.
Jusqu’à ce jour, la Côte d’Ivoire peine à résoudre son problème d’immatriculation des terres parce que certaines réalités n’ont pas été prises en compte. « A la vérité, le système colonial australien n’est pas le même système colonial qu’en Côte d’Ivoire ou en Afrique de l’Ouest ! Et on importe quelque chose qui n’est pas conforme à nos réalités », a martelé Néné-bi.
La question de la sécurisation des terres
Selon l’orateur, dans ce modèle australien, les aborigènes ou natifs ont été regroupés dans des réserves pour faciliter la délimitation des autres espaces. Ce qui n’est pas le cas d’ici et explique cet échec après cent ans. « Pourquoi ça ne passe pas et on n’y prête pas attention ! A un moment donné, il faut s’arrêter ! », S’est exclamé le Professeur.
Pour lui, Le 15 novembre 1935, il y a eu un texte de loi qui est encore application en Côte d’Ivoire, bien qu’il y ait eu des évolutions.
D’après le conférencier, la gouvernance est approximative. « Le problème aujourd’hui, c’est qu’on n’a pas le sens de l’Etat, on n’a pas le sens de l’institution publique, la chose publique. On dit qu’on est dans une République, on ne sait pas ce qu’on entend par ‘’République’’ », s’est-il offusqué. Avant d’ajouter qu’il « faut repenser l’Etat ».
Pour cela, le Pr. Néné-bi préconise que les universitaires prennent sérieusement en compte la question foncière. « Regarder dans le curriculum des universités, il y a combien qui font véritablement du foncier ? Combien font du foncier ? Les gens ont juste quelques heures, or cela doit être une matière fondamentale pour nous en Côte d’Ivoire, aussi bien dans son volet urbain que rural parce que, c’est une société jeune », a-t-il préconisé.
Aussi, faut-il que selon le conférencier, les sociétés paysannes soient visitées, par les étudiants pour s’imprégner de la question du foncier rural. C’est pourquoi, il a salué les initiateurs de cette tribune d’échanges. « Je voudrais féliciter déjà Alerte-Foncier même si au départ, j’étais un peu sceptique, je crois que c’est une bonne nouvelle », a-t-il reconnu.
Problématique de la gouvernance des terres
Pour Néné-bi, l’initiative peut booster la bonne gouvernance sur le foncier en Côte d’Ivoire car une terre rurale peut voyager, même si elle ne bouge pas physiquement. Selon lui, c’est la cause de l’expansion des villes bien que le secteur primaire se limite en milieu rural. Mais, dès que cette terre intègre le périmètre communal ou la ville, elle devient urbaine. « À ce moment elle est régie désormais par le ministère de la construction et de l’urbanisme mais aussi accompagner par le ministère des infrastructures économiques. Quelque fois aussi, l’on construit quelques écoles et on rentre dans le système du ministère de l’éducation nationale », a révélé le professeur. Avant d’ajouter que le ministère de l’environnement est transversal.
Le conférencier a terminé en disant qu’aussi bien en milieu rural qu’urbain, le ministère de l’environnement doit pouvoir avoir un droit de regard, afin d’éviter l’anarchie. Il estime qu’il n’y a pas trop de vigilance d’où les fraudes. « L’Etat de Côte d’Ivoire s’il est pensé, s’il est compris en tant que chose de tout le monde… les politiques économiques pourront avoir un essor réel», a-t-il souhaité.
Eugène Kouadio