Secrétaire de formation, Hélène Rolande Gozoi, a tout abandonné pour se consacrer à sa passion, l’art de la décoration. Aujourd’hui militante du développement durable, elle a reçu le « Prix spécial Développement durable » au Fafel (Forum africain des femmes leaders), le mois dernier.
A quel moment décidez-vous de vous consacrer à la décoration ? Et Pourquoi les pneus usés ?
C’est en 2013, que j’ai décidé de suivre véritablement ma passion avec le recyclage des pneus. Parce que j’ai constaté que les pneus ne se détériorent pas facilement. Il faut au moins quatre siècles (400 ans) pour sa destruction. Et ceux qui sont usés et entassés dans les rues çà et là sont souvent des nids de reproduction de moustiques qui sont des agents vecteurs du paludisme. Une maladie qui sévit le plus en Afrique.
De plus, c’est avant tout ma contribution à la protection de notre environnement. Car brûler les pneus comme nous le faisons, est nuisible pour l’air que nous respirons d’une part, d’autre part, cela détruit la couche d’ozone.
En dehors des pneus quels sont les autres matières premières que vous utilisez ?
Dans le souci de protéger notre environnement, je ne jette rien, j’essaie toujours de rattraper. Des bouteilles en plastique aux vêtements qui ne sont plus utilisables en passant par les palettes. Je récupère tout.
Qu’est ce que vous faites concrètement des objets usés ?
Je démonte les palettes pour en faire des meubles. Notamment des caisses, lits, armoires, étagères etc. Les bouteilles vides me servent pour les pots de fleurs, des décoratifs. Quant aux copeaux de bois qu’on trouve chez les menuisiers, je m’en sers pour faire la décoration.
L’art de la décoration nourrit-il son homme?
Honnêtement, non ! Mais ce que j’en tire est plus que grand. Je vis ma passion, mon rêve avec beaucoup d’amour. Je suis heureuse de faire du bien aux autres. Car mon credo, c’est de faire du bien autour de moi, c’est apporter une couleur, la joie, le sourire, la satisfaction.
Justement vous faites du social en marge de la décoration. Comment arrivez-vous à gérer ce monde ?
J’ai en ce moment à ma charge 27 personnes dont 10 veuves et 17 orphelins. Ce sont des gens que je ne connaissais pas auparavant, mais je subviens à leur besoins grâce à ce que je gagne. Je m’attèle à ce qu’il mange à leur faim tout en projetant également de les aider à s’installer à leur propre compte. Et justement pour cela, je remercie Dieu parce qu’il pourvoit toujours à nos besoins quotidiens.
Qu’est-ce qui vous a motivée à allier ce volet social à votre art ?
Très tôt, j’ai été retirée à ma mère pour devenir une pensionnaire de l’Orphelinat national des jeunes filles de Grand-Bassam. Où je suis restée pendant tout mon cursus primaire. Ce qui m’a donné une autre vision de la vie au point que j’ai comme feuille de route aujourd’hui le passage biblique d’Isaïe 58. « Détache les liens de la méchanceté, donne ton pain à celui qui a faim, si tu trouves quelqu’un qui est nu habille le, si tu trouves quelqu’un qui n’a pas un abri donne-lui gîte… » .
Cet élan de générosité c’est Dieu qui veut qu’il en soit ainsi ! On ne fait rien par notre force ni par notre intelligence mais par l’Esprit de Dieu. Donc, je me dis que c’est l’Esprit de Dieu qui me conduit.
Avez-vous une structure d’actions sociales telle qu’une ONG ?
Non, Dieu ne m’a pas donné l’autorisation de le faire. Lui-même, il le dit : « Quand la main gauche donne, la main droite ne doit pas savoir et vice-versa ». Donc ce n’est pas la peine de « faire une communication » pour attirer les regards sur soi, au risque de devenir cupide.
Est-ce la maison qui sert de cadre à vos créations ?
Mon atelier principal se trouve à Yopougon carrefour menuiserie. Mon domicile me sert également d’atelier de travail.
Est-ce que vous pensez à transmettre votre savoir-faire à la postérité ?
Oui, mais la situation actuelle avec cette maladie m’a freinée un peu parce que j’avais commencé à lancer des formations pour adultes et enfants dans des ateliers de création.
Mon objectif, c’est que « Le recyclage, la décoration, objectif protection environnement » soit inséré dans le programme scolaire, comme partout ailleurs.
Est-ce que vous travaillez en collaboration avec d’autres personnes ?
Je travaille avec des ébénistes, des tapissiers qui sont des professionnels.
Entretien réalisé par
Eugène Kouadio